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AMÉLIE

mières amours le bonheur que j’avais vu fuir ; que je craignais de ne plus ressaisir.

Monté à l’appartement de l’inconnue, je la pressai de quitter ce masque qui dérobait sans doute à mes regards les traits de celle dont l’image était gravée dans mon âme ; elle fut encore longtemps à m’accorder cette faveur précieuse. Enfin, elle voulut bien se rendre à mes désirs ; je m’attendais à te voir : mes yeux prévenus pénétraient déjà l’insupportable carton qui nous séparait en quelque sorte l’un de l’autre lorsqu’il tomba ; et quoique le temps qu’elle employa à délier les cordons fût très court, l’attente du plaisir que je me promettais me fit éprouver une impatience telle que je n’en ai jamais ressenti de plus vive dans ma vie. Mais, ô ciel ! quel fut mon malheur, quand je me vis trompé dans mes flatteuses espérances ! Quel fut mon étonnement quand je reconnus… Adélaïde ! cette même Adélaïde qui était sortie avec toi du fatal château, lorsque ma blessure m’avait empêché de fuir avec vous. Un mouvement de dépit me fit reculer quelques pas en arrière ; mais bientôt, me rappelant que nous lui devions la liberté, je me précipitai dans ses bras en l’assurant du plaisir que j’avais à la revoir.

Ce retour de ma part répara un peu le froid momentané de l’accueil involontaire que je lui avais fait d’abord ; aussitôt que ma surprise m’a permis de parler, je lui demandai de tes nou-