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AMÉLIE

éloigné de l’endroit d’où je sors, pour y aller chercher du secours, et je ne puis abandonner ma voiture sur un grand chemin, sans m’exposer à être pillé. J’ose attendre de votre complaisance que vous voudrez bien me permettre d’atteler votre cheval à mon cabriolet, si votre intention est de vous rendre à Ponte Centino, par où je dois passer, et là, je prendrai la poste jusqu’à Rome, où j’ai dessein d’aller.

— Je suis trop heureuse, lui répondis-je en mettant pied à terre, de pouvoir vous être utile ; disposez de mon cheval ; je ne vous assure pas qu’il fera votre affaire, car je ne l’ai encore employé qu’à la selle, et j’ignore s’il est dressé à traîner une voiture.

— Essayons-en toujours, puisque vous le voulez bien ; avec de la prudence, j’espère qu’il nous mènera à bon port.

Et en un instant mon cheval fut attelé. On attacha la selle sur la malle qui était derrière, et nous montâmes en voiture. Il fit d’abord beaucoup de difficultés, et on ne tarda pas à s’apercevoir qu’il n’était point habitué à tirer ; cependant, après quelques écarts, il se mit en train, et nous nous crûmes sauvés. Mais à peine avions-nous fait cent pas, que le maudit cheval, impatienté du bruit de la voiture, auquel il n’était point accoutumé, s’emporte, quitte la route et nous mène à travers champs, d’écueils en écueils, sans qu’il soit possible de parvenir à