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AMÉLIE

Seule dans le couvent, je n’y étais encore qu’à l’insu des moines admis aux plaisirs du chef. Quand ceux-ci me voyaient, ce n’était que dans les jours de débauche générale, où j’avais l’air d’avoir été introduite avec les autres femmes qu’on y faisait trouver. Enfermée tout le jour dans une chambre, je ne descendais que la nuit au jardin, accompagnée du gardien ou d’Hilarion, qui avait voulu conserver ses droits, et je m’y voyais souvent obligée de renouveler, avec l’un ou l’autre, les exercices du jour.

L’extrême désir que j’avais de me débarrasser de leurs mains me faisait inventer mille expédients pour leur échapper ; mais presque toujours l’impossibilité de réussir m’obligeait, en rompant mes mesures, de rester malgré moi le plastron de leurs débauches. Enfin, une idée heureuse vint me tirer d’embarras, et rendit à mon esprit agité l’espoir qu’il commençait à perdre.

Le gardien était d’une taille moyenne ; je présumai que ses habits de moine iraient à la mienne, en gardant par-dessous ceux de mon sexe, et qu’à l’aide de ce travestissement, je pourrais hasarder de sortir de cette maison et voyager plus sûrement dans ce pays inconnu. L’imagination une fois montée, il faut que cette idée s’effectue ; je ne m’occupe plus que des moyens de la faire réussir.

Dès le lendemain, pendant que le révérend