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AMÉLIE

quelques moyens, pour éloigner de nous le besoin qui commençait à se faire sentir. Je lui avais déjà conseillé cent fois de se présenter au concert, où je le flattais qu’il serait admis ; mais il aurait fallu travailler pour s’y montrer avec succès, et Ferdinand était l’être le plus paresseux qu’on pût trouver : il n’en fit rien.

Inquiète sur le sort qui m’était réservé avec cet insouciant, j’appréhendais à chaque instant qu’on nous mît à la porte de l’hôtel où nous étions logés, faute de pouvoir y payer notre dépense. Cette idée me poursuivait sans cesse ; enfin, un soir je ne vis pas rentrer Ferdinand, comme de coutume ; mes inquiétudes redoublèrent ; je me rappelai qu’en sortant le matin, il m’avait paru un peu agité ; j’en conclus ou qu’il avait eu dispute avec quelqu’un, et que, m’en ayant fait un mystère, dans la crainte de m’alarmer, il avait péri au rendez-vous qu’on l’avait forcé d’accepter, ou que nous voyant sans ressources, il avait plus écouté son désespoir que son amour, et avait terminé une vie qu’il ne supportait, à ce qu’il me disait depuis quelque temps, qu’à cause de moi.

Ces différentes réflexions m’avaient empêchée de dormir. Le lendemain de bonne heure, on vint frapper à ma porte. C’étaient des officiers de police qui avaient ordre de faire chez moi une exacte perquisition dans nos effets, parce que Ferdinand avait été arrêté la veille, comme