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AMÉLIE

me persuadant qu’il était impossible de me rejoindre, à moins qu’on ne sût précisément par où je fuyais ; ce qui n’était pas présumable, puisque j’étais sûre de n’avoir été vue de personne, et que je n’avais demandé mon chemin à qui que ce fût.

Nous arrivâmes de bonne heure à Cadix : je pris un logement dans la même hôtellerie que les dames qui avaient bien voulu m’y amener ; et après leur avoir fait mille remerciements de leur bonté, je montai à la chambre qu’on m’indiqua pour aviser aux moyens qu’il me faudrait employer pour avoir, de Lelio, des nouvelles que je brûlais et que je craignais d’apprendre.

De retour dans une ville où j’avais connu le bonheur, je ne pus me défendre de verser quelques larmes, en comparant le temps que j’y avais passé dans une maison où tout prévenait mes désirs, avec celui où je me retrouvais, seule, abandonnée de toute la terre. Mes espérances détruites par la mort de Borglia ; le fatal combat qui avait renversé mes projets, tout se réunissait contre moi, pour m’accabler de souvenirs douloureux. Livrée à moi-même, je sentis plus que jamais la nécessité de prendre, sans différer, les informations qui, seules, pouvaient faire cesser l’incertitude qui me tourmentait. Je profitai donc de la facilité que me procurait mon déguisement, et dès le lendemain matin, j’allai dans les environs de la maison de Lelio, bien