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AMÉLIE

charge à Portsmouth, partait dans trois jours pour Cadix ; qu’il avait retenu nos places, et que, dès le lendemain, nous partirions pour ce port. Le reste de la journée fut employé à m’acheter les choses les plus nécessaires pour le voyage, et à faire nos malles. Le lendemain, nous nous rendîmes à Portsmouth. Bientôt on annonça le départ du vaisseau : nous nous embarquâmes, et, après une heureuse traversée, nous entrâmes sans accident dans le fameux port de Cadix, où j’eus le plaisir de voir arriver une flotte qui revenait des Indes ; et ce beau coup d’œil fut, en quelque sorte, pour moi un dédommagement des fatigues du voyage.

Transportée en Espagne, par l’effet du hasard, à près de quatre cents lieues de mon pays, sous la protection d’un homme que je connaissais à peine, je sentis bien qu’il n’était plus possible d’agir d’après moi ; qu’il ne me restait qu’à obéir aveuglément aux volontés de celui dont mon sort allait dépendre ; ainsi donc, dès ce moment je fis vœu tacite de soumission.

En débarquant, Borglia me dit qu’il me ferait passer chez lui pour la fille d’un de ses correspondants de Londres, qui, venant d’éprouver des pertes considérables, qui l’avaient totalement ruiné, m’avait confié à ses soins, pour me mettre au fait du commerce.

— Vous parlez fort bien anglais, me dit-il, il ne vous sera pas difficile de paraître ce que je vous annoncerai.