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AMÉLIE

tout oser, il reçoit la récompense de ses amoureux transports.

Mon rôle n’était point encore achevé, il fallait faire agir la honte, la confusion, ces sentiments qui suivent ordinairement les sacrifices, où l’amour semble avoir triomphé seul de la pudeur ; aussi je me cachai la figure, et j’affectai de ne pas oser le regarder. Il m’accabla de caresses, me dit les choses du monde les plus flatteuses, sur mes bontés pour lui, et me força par degrés à retrouver un maintien que je cherchais depuis longtemps à reprendre.

Dès que je fus un peu remise, il me dit qu’il avait une grâce à me demander, qu’il espérait que je la lui accorderais.

— Après ce que vous venez d’obtenir, lui dis-je, il me serait bien difficile de vous refuser quelque chose.

— Ainsi donc, un voyage sur mer ne vous effrayerait pas, et vous vous sentez assez de courage pour m’accompagner à Cadix ?

— On brave tous les dangers, lui répondis-je, avec l’objet aimé, et rien que la mort ne me séparera de vous.

Cette preuve de mon amour lui causa tant de joie, qu’il me dit qu’il allait tout disposer pour notre embarquement.

En effet, il ne perdit point de temps et revint, deux heures après, m’annoncer qu’il venait d’avoir l’avis qu’un vaisseau marchand, en