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AMÉLIE

parer ce qui m’était nécessaire pour mon départ. Quand le soir les domestiques furent retirés, je m’enfermai aux verrous pour n’être pas surprise, et j’attendis avec impatience le moment où mon cher abbé paraîtrait ; je laissai même la croisée ouverte, pour ne pas le faire attendre et être prête au premier signal.

Vers une heure du matin j’entendis frapper dans le fossé au bas de ma fenêtre ; j’y courus pour voir ce que c’était ; je distinguai la voix de l’abbé qui me disait d’être tranquille, qu’il allait bientôt me rejoindre. Il ne cessait de cogner, et je ne pouvais pas deviner ce qu’il faisait.

Enfin, au bout d’une demi-heure il était à une toise de ma fenêtre ; je vis alors qu’il enfonçait, dans les jointures des pierres, des piques de fer, de distance en distance, pour y poser les pieds et en former une échelle pour parvenir jusqu’à moi. Il eut bientôt achevé son ouvrage, et je le reçus, avec plaisir, dans mes bras, où il prit le temps de se délasser de ses fatigues.

Ce n’était pas le tout que l’abbé fût monté ; il fallait qu’il descendît et que j’imitasse son exemple. Je n’avais pas une grande confiance dans un pareil escalier ; il me rassura cependant, et pour me déterminer il jeta dans le fossé les paquets que j’avais préparés ; il sortit ensuite le premier, en me disant d’examiner comment il s’y prendrait, et d’être bien tranquille sur la solidité de son travail. Je sortis donc, à recu-