Page:Amélie, ou Les Écarts de ma jeunesse, 1882.djvu/191

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
185
AMÉLIE

Quand cette scène unique fut achevée, Fanny se rhabilla et sortit pour regagner sa chambre, bien satisfaite de ce qui venait de se passer. Le pauvre abbé, confus, désespéré de cette incartade, me fit un million d’excuses et m’assura que jamais il n’y avait rien eu de commun entre Fanny et lui ; que, s’il avait eu peur de ses menaces, c’était moins pour lui que pour moi, qui aurais été la première victime. Je ne répondis pas grand’chose à tout cela ; je le priai seulement de retourner chez lui, ce qu’il fit, en me demandant la permission de me revoir le lendemain matin.

Heureusement que cette comédie eut lieu pendant la nuit ; j’eus moins à rougir de la honte qu’elle m’inspira. Dès que je fus éveillée, Fanny vint à l’ordinaire pour me lever ; elle me demanda pardon de ce qu’elle avait fait, et m’avoua que son amour pour l’abbé lui avait fait oublier tout ce qu’elle me devait, pour le satisfaire. J’eus l’air de me contenter de ses raisons : elle me dit qu’à l’avenir elle se garderait bien de troubler nos plaisirs ; qu’elle ferait, au contraire, tout ce qui dépendrait d’elle pour les faciliter.

Un instant après, l’abbé parut ; il se jeta à mes genoux pour me demander excuse de l’infidélité qu’il avait été forcé de me faire pour éviter un plus grand malheur, et me promit d’effacer, à force de tendresse, jusqu’au souvenir