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AMÉLIE

réussis point, n’ayant pas le pouvoir de me faire obéir. Fanny devenait pressante.

— Vous ne répondez rien, dis-je avec dépit à l’abbé ; c’est cependant à vous qu’est remis le droit de nous accorder. Sont-ce donc toujours les gens d’esprit qui sont les plus embarrassés dans les affaires difficiles ? Levez-vous, et allez rendre chez vous, à Fanny, l’hommage que vous devez à ses appas.

— Non, non, reprit cette fille audacieuse, ce n’est point là ce qu’il me faut ; j’exige que ce soit dans votre lit.

— Vous souffrirez au moins que je me lève et que je ne sois pas témoin…

— Non, c’est la seule vengeance que je veux tirer de vous.

Comme l’abbé ne répondait rien, elle crut voir son consentement dans son silence, et en un instant elle fut déshabillée et placée dans le lit entre nous deux. Il fallait qu’il fût en état de grâce, pour que Fanny obtînt une vengeance complète ; cela me paraissait fort difficile, parce que, d’un côté, le pauvre diable venait de faire un violent exercice, et que, de l’autre, la peur avait peut-être un peu contribué à diminuer ses facultés ; cependant, cette fille industrieuse fit tant, qu’elle parvint à rendre, à l’objet de ses désirs, toute l’élasticité qui lui était nécessaire, et bientôt les soupirs qu’elle poussa me donnèrent la certitude qu’elle n’avait pas perdu ses peines.