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AMÉLIE

mieux pour ne point éveiller le soupçon sur ce qui venait de se passer, et on reprit la promenade. Chemin faisant, mon amant me renouvela les protestations de son amour, et il fut convenu qu’en prenant toutes les précautions nécessaires, nous passerions la nuit ensemble.

De retour au château, nous nous retirâmes chacun dans notre appartement, pour ne nous réunir qu’à l’heure du dîner. Ce fut dans ce moment-là que nous prîmes toutes nos dimensions pour faire réussir nos projets de plaisir pour la nuit suivante. Il me tint compagnie toute la journée sans que cela parût étonnant, puisque nous étions seuls. Vers onze heures il me quitta sous prétexte d’aller se coucher ; et moi, je passai dans mon appartement.

Minuit sonnant, minuit, l’heure des amours, était précisément l’heure de notre rendez-vous ; l’abbé devait se rendre chez moi par un petit escalier dérobé qui donnait dans la garde-robe de ma chambre à coucher. Minuit sonne, il est dans mes bras ; déjà il recevait un nouveau prix de son amour, et nos âmes tout entières se noyaient dans une mer de délices, quand nous entendons quelqu’un entrer doucement dans ma chambre, dont l’impatient et trop imprudent abbé avait oublié de fermer la porte.

— Qui va là ? m’écriai-je avec humeur, et comme quelqu’un qui vient de se réveiller en sursaut.