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AMÉLIE

ne faisais pas attention au chemin que nous suivions. Je m’en rapportais entièrement à lui, sur la route qu’il me faisait parcourir, bien persuadée qu’il ne m’égarerait pas, puisque nous tendions au même but.

Déjà nous avions suivi et traversé plusieurs allées, quand il m’en fit prendre une qui conduisait à une charmille, dans laquelle se trouvait un pavillon, où j’avais été m’ennuyer quelquefois avec milord. Je me doutais bien de l’intention de mon conducteur ; et, favorablement disposée, comme je l’étais pour lui, on n’a pas de peine à croire que je n’hésitai point à l’accompagner. Quand nous fûmes à la porte du pavillon, il m’invita, d’un air galant, à entrer pour prendre le frais. Je me rendis à l’invitation et me jetai sur un lit de repos, où l’abbé pris place à côté de moi. Ces messieurs sont très prompts dans leurs expéditions ; à peine se donna-t-il le temps de me reparler de sa tendresse, il voulut m’en convaincre ; déjà plusieurs baisers m’avaient été pris : un seul, que je rendis par hasard, mit le feu à la mèche ; et le fripon, en me renversant, m’apprit que l’éloquence et l’érudition n’étaient pas les seuls talents qu’il possédât.

Une heure entière s’écoula dans l’ivresse des sens et dans les raffinements d’une jouissance que le voluptueux abbé sut prolonger par tous les moyens possibles. Quand il eut mis fin à ses amoureux transports, chacun se rajusta de son