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AMÉLIE

à rester dans cette maison, dont j’ignorais les usages, la regardant pour lors comme l’unique remède aux maux que mes inconséquences m’avaient attirés. On fut très satisfait de me voir accepter ; pour moi je me félicitai de mon côté d’avoir fait une heureuse rencontre.

Quand tout fut arrangé, mon nouveau galant sortit et ne revint que le soir. À onze heures, on nous laissa seuls dans la pièce qu’on m’avait destinée ; il nous y enferma et se mit au lit en m’invitant à venir l’y rejoindre ; quand j’aurais fait la difficile, il eût toujours fallu en venir là, et je n’aurais pas eu le mérite de faire de bonne grâce, ce qu’on avait d’abord exigé. Je ne me fis donc point prier, et je n’eus pas lieu d’avoir regret de ma complaisance ; car Hercule, dont on a si hautement vanté les exploits dans ce genre, ne s’est peut-être jamais autant signalé que mon vigoureux athlète.

Le lendemain, je retournai chez la Dupré, pour n’être pas tout à fait dupe de cette femme, qui n’aurait pas mieux demandé que je la laissasse en repos. Le ton de fermeté que je mis, en réclamant ce qui m’appartenait, l’empêcha sans doute de retenir mes effets, car elle me les remit sur-le-champ, à l’exception du peu d’argent qu’elle avait entre les mains, dont j’aimai mieux faire le sacrifice que d’avoir plus longtemps des intérêts à démêler avec une femme que j’avais en horreur.