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AMÉLIE

temps il me joint sur le lit, où je suis obligée d’acheter, en me résignant à ses volontés, l’espèce de protection qu’on veut bien m’accorder.

On nous avait sans doute examinés pendant le cours de cette opération, car mon inconnu descendait du lit quand sa prétendue mère entra. Dès que je l’aperçus, je me couvris les yeux avec mes mains, tant j’étais honteuse qu’une femme me surprît en cet état ; elle vint à moi, me plaisanta sur ce qui venait de se passer entre son fils et moi, et sous prétexte de me chatouiller pour m’enhardir à la regarder, elle releva ma chemise et la détourna plusieurs fois, malgré ma résistance, pour faire l’examen de mes charmes.

La conduite étrange de cette femme hardie me parut un peu suspecte : je ne pouvais concevoir comment une mère osait ainsi se prêter au libertinage de son fils, et l’y encourager par les propos les plus licencieux. J’eus beau réfléchir sur ce qui se passait sous mes yeux, je fus loin de toucher au but, et mes idées se perdirent dans un labyrinthe de conjectures, toutes plus fausses les unes que les autres. La vérité était, comme je le sus quelques jours après, que ce jeune homme, fin connaisseur en fait de femmes, avait cru voir, du premier coup d’œil, tout le parti qu’il pouvait tirer de l’aventure, et trop éloigné de chez lui pour me proposer de m’y conduire, ce que j’aurais pu d’ailleurs refuser,