Page:Amélie, ou Les Écarts de ma jeunesse, 1882.djvu/167

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
161
AMÉLIE

dédommager du temps qu’il vient de perdre.

— Grâces vous soient rendues, ma belle, me dit-il, de la métamorphose que vous venez d’opérer : daignez me permettre actuellement, de vous en témoigner toute ma reconnaissance.

Et sans attendre ma réponse, qu’il devina, il me prit dans ses bras et me porta sur un sopha, où j’oubliai sans peine les moments de dépit que mes premières tentatives m’avaient causés.

Dans le même temps, un autre homme, qui pouvait bien avoir cinquante ans, vint un soir me trouver dans ma chambre, avec un air mystérieux et me dit que depuis plusieurs jours il cherchait l’occasion de me trouver seule, pour passer avec moi quelques instants délicieux. Qu’il osait espérer de ma complaisance, que je ne le refuserais pas, et qu’il serait très reconnaissant de cette marque de bonté.

L’air suppliant de cet adorateur ne m’annonça rien de bon ; je me doutai bien que sa visite n’avait pas pour but de me procurer de grands plaisirs, et que, si par hasard il lui était encore possible de m’en faire éprouver, quels qu’ils fussent, je serais obligée de les acheter un peu chèrement, par une patience à l’épreuve et un travail pénible. Je ne m’étais pas trompée, car dès que j’eus répondu que j’étais flattée de l’honneur qu’il m’avait fait de me choisir, pour lui rendre quelques services agréables, il quitta l’air soumis qu’il avait d’abord pour paraître