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AMÉLIE

velle ; en nous quittant, il me remit trente louis et me donna la main jusqu’à la voiture qui m’avait amenée, dans laquelle, en usant des mêmes précautions, on me reconduisit chez moi.

Quelque temps après cette brillante expédition, il se présenta à la maison un homme d’une trentaine d’années, qui me fit demander la permission de passer, dans l’après-midi, une heure avec moi ; j’accordai facilement le rendez-vous, et à quatre heures et demie, comme nous en étions convenus, j’entrai au salon, où j’étais déjà attendue. Mon premier soin fut d’examiner, de la tête aux pieds, l’homme auquel j’allais avoir affaire. Il était vêtu dans le genre simple, mais très proprement. Son extérieur, quoique grossier, avait pourtant quelque chose d’agréable, et son teint vif et coloré, annonçait une santé robuste. Il me balbutia, d’un air assez maladroit, quelques compliments mal tournés, auxquels j’eus l’air d’être sensible, et il m’embrassa avec assez de timidité, en me priant de me mettre à la légère, pour lui procurer le plaisir de voir les beautés que ma jolie figure semblait lui promettre. Toujours docile aux volontés des autres, je me débarrassai du peu de vêtements qui lui faisaient ombrage, et j’exigeai, à mon tour, qu’il quittât les siens. Cet ordre ne parut pas d’abord de son goût ; cependant, sur mes instances réitérées, et d’après les menaces que je lui fis de me r’habiller, s’il ne