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AMÉLIE

Quand cette cérémonie, dont je ne devinais pas la nécessité, fut achevée, mon galant me mena dans une pièce à côté, où le valet de chambre nous suivit, apportant sous son bras deux petits coffrets qu’il mit par terre, au milieu du salon. J’avoue que ces préparatifs me donnèrent de l’inquiétude : je me rappelai cependant que la Dupré m’avait dit que je ne devais rien craindre. Je me rassurai donc. On ouvrit enfin ces trésors, et j’eus bien regret de mes frayeurs, quand je vis retirer de l’une de ces boîtes, une longue queue et des oreilles de dogue : le valet de chambre me les remit et me montra l’usage que j’en devais faire.

Les deux oreilles étaient attachées à un bandeau, que je mis sur la tête de mon galant, et lui passai autour du corps une ceinture, à laquelle pendait la queue. Ainsi équipé, il marcha sur les mains et sur les pieds, et je ne pus alors m’empêcher de rire aux éclats, en le voyant, dans cet accoutrement, faire le tour de la pièce, en donnant à la queue et aux oreilles, dont je l’avais décoré, les mouvements naturels du chien, qu’il avait imité plus d’une fois, si l’on en peut juger par l’aisance avec laquelle il s’en acquittait. L’autre contenait un bassin d’argent, rempli de miel : je crus d’abord que c’était là le souper du dogue, et je ne me trompais pas ; mais j’ignorais de quelle manière il s’y prendrait pour le manger : je ne m’attendais sûrement pas que