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AMÉLIE

trouverais au rendez-vous à l’heure indiquée. Je fis une toilette brillante, parce que je présumai bien qu’un homme qui s’annonçait si généreux, avant de savoir s’il serait écouté, ne pouvait qu’être un homme comme il faut, et midi sonnait, quand j’entrai dans le jardin.

Je n’y avais pas fait vingt pas, que je vis venir à moi, avec un air enjoué, un jeune homme bien mis et d’une jolie figure, qui me fit mille honnêtetés, et m’offrit sa main pour me conduire à sa voiture. Elle nous attendait, en effet, à la porte ; nous montâmes, et en moins d’une demi-heure, nous arrivâmes à Neuilly, dans une charmante maison de campagne, dont il était propriétaire. Il me la fit parcourir en attendant le dîner ; je la trouvai commode et bien distribuée ; mais les jardins surtout me semblèrent délicieux.

À deux heures, on nous servit un superbe dîner, où la délicatesse des mets et l’excellente qualité des vins avaient été soigneusement recherchées. Après le dîner, nous passâmes dans un salon orné de glaces et meublé dans le goût le plus exquis. Nous y restâmes environ une heure à causer, sans qu’il fût question de l’objet pour lequel il semblait m’avoir invitée. Je remarquai, avec assez d’étonnement, que depuis que nous étions ensemble, il ne m’avait pas seulement embrassée une fois : je ne savais à quoi attribuer tant de froideur, et mon amour-propre