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AMÉLIE

expier tes crimes. Apprête-toi à subir le supplice dû aux forfaits dont tu t’es rendu coupable envers la malheureuse Antoinette.

J’étais allée pendant ce temps fermer la porte de la salle d’entrée, et j’en avais mis la clef dans ma poche. Le curé, étourdi de cette subite apparition, n’avait pas encore essayé de se soustraire au danger qui le menaçait ; quelques moments suffirent pour le remettre de sa frayeur. Il se leva avec précipitation et se jeta sur un des amis de Lebrun, qu’il aurait désarmé, et peut-être blessé, si l’autre ne s’y fût opposé. On s’en empara alors. Quand il se vit serré de plus près, il voulut crier ; mais Lebrun, qui se ressouvint qu’en pareille occasion le curé avait usé envers moi d’un moyen violent pour m’en empêcher, lui fit attacher ensemble les mains derrière le dos, pendant qu’il lui mettait dans la bouche, comme il me l’avait fait, un mouchoir roulé, dont il lia les deux bouts par derrière. Puis, s’adressant au scélérat qui ne pouvait plus faire usage de ses mains, ni appeler du secours :

— Tu vas être pendu, lui dit-il, c’est la mort la plus douce que nous puissions t’accorder.

Pendant qu’il lui annonçait d’un air si positif le supplice effrayant qui lui était réservé, un des amis de Lebrun, monté sur une table, enfonçait à coups de marteau dans le mur un énorme crochet de fer, capable d’en tenir dix comme lui suspendus, et l’autre lui passait une grosse corde autour du cou.