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AMÉLIE

lui faire la moindre objection, en me tenant serrée dans ses bras, la bouche fermée par la sienne. Je fais cependant des efforts continus pour me débarrasser de ses mains ; mais ma défense est si faible, en comparaison de la résistance d’un homme dans toute la vigueur de l’âge, que je ne peux y réussir.

Il ne me reste donc qu’une ressource, celle d’appeler du secours, pour faire cesser la violence qu’il exerce contre moi. Au premier cri qu’il m’est possible de faire entendre, il me met une main sur le visage, me presse contre le mur, et de l’autre, il prend dans sa poche un mouchoir qu’il me passe dans la bouche, en le liant autour de ma tête. Cette atrocité excite en moi une fureur dont je ne suis plus maîtresse : je redouble d’efforts et je parviens à lui échapper. Il me poursuit tandis que je tâche, en vain, de détacher le mouchoir qui m’ôte une partie de la respiration ; mais, soit que l’indignation dont j’étais saisie eût tout à coup suspendu mes mouvements, soit que les derniers efforts que j’avais faits eussent épuisé mes forces, trop longtemps essayées, il me fut impossible de me soutenir davantage, et je tombai évanouie aux pieds de mon persécuteur. Cet état de faiblesse qui, pour tout autre qu’un monstre accoutumé à de pareilles horreurs, aurait été le frein d’une passion, dont on ne peut pas quelquefois réprimer les premiers élans, servit, au contraire, à