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AMÉLIE

transports que nous éprouvâmes ! Pauvre amant ! que n’avais-tu des ailes pour voler dans mes bras ! Et moi, amante infortunée ! que ne pouvais-je m’élancer dans les tiens ! Nous voulions nous parler ; mais la peur d’être entendus nous arrêtait, nous nous contentions de nous regarder ; et nos regards, nos gestes exprimaient assez ce qui se passait dans nos cœurs.

Il était encore si matin que personne n’était levé ; nous pouvions donc, sans danger, profiter de ce moment précieux. Je lui fis signe d’attendre un instant, et après m’être assurée que ma mère dormait, j’écrivis le billet suivant, que je jetai par la fenêtre en me retirant :


« Trouvez-vous, cet après-midi, mon ami, à six heures précises, à la petite porte verte du pavillon qui donne sur l’avenue, au bout du parc : je ne puis vous en dire davantage… Fuyez… et croyez que je vous aime trop pour douter de votre fidélité. »


Il est aisé de concevoir l’effet que produisit ce billet sur cet amant aimé et digne de l’être : le doux espoir rentra dans son cœur ; ses chagrins se dissipèrent, et l’aimable sérénité reparut sur son visage, trop longtemps flétri par ses pleurs.

De mon côté, je m’occupai des moyens de tenir ma promesse.

Ma mère avait ce jour-là grand monde à