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AMÉLIE

dans la tête de prendre une petite maison de campagne, pour rendre plus agréables les parties qu’on pourrait faire chez elle, avec nous. Elle y avait consenti, et venait d’en louer une toute meublée, dans les environs de Paris.

Avant de la consacrer à l’usage de ceux qui la lui avaient fait prendre, elle voulut nous y conduire seules avec elle, pour nous distraire, pendant quelques jours, des plaisirs bruyants qui nous obsédaient sans cesse. Rien n’était plus flatteur qu’une proposition qui avait pour but de nous rendre un moment à la tranquillité, et de nous mettre à portée de jouir enfin de nous-mêmes ; car nous étions rarement ensemble, quoique dans la même maison, à cause des occupations distinctes et séparées qui nous écartaient l’une de l’autre.

J’avais déjà remarqué, avec un plaisir infini, que mes compagnes s’exprimaient en bons termes et avec grâce ; qu’elles avaient des talents agréables, qui sont le fruit ordinaire d’une éducation suivie, et qu’elles n’avaient point été élevées pour l’état où je les voyais ; je brûlais d’impatience de les connaître mieux, et de savoir par quelle fatalité elles étaient tombées dans la malheureuse position où nous étions toutes les trois réduites.

L’occasion ne pouvait être plus favorable. Depuis plusieurs jours nous habitions cette maison de campagne où nous ne faisions que