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vancier le martyr platonicien, Clément soutenait que la philosophie avait été donnée aux Grecs de même que la loi aux Juifs, pour les conduire au Christ ; que l’une et l’autre étaient, par rapport au Christianisme, comme les fractions de la vérité une[1]. De plus, il défendait encore la philosophie, quant à sa valeur formelle, comme moyen efficace d’aiguiser et d’affiner l’esprit, d’affermir le regard de l’intelligence, et ainsi de rendre l’homme capable de discerner le vrai du faux[2]. Cependant pour ne pas donner prise à des opinions philosophiques exagérées, il posait en principe, comme nous l’avons dit plus haut, que la foi de l’Église doit être la base et la règle du gnostique chrétien, dans toutes ses investigations scientifiques. Celui-là seul est un vrai sage qui, ayant blanchi dans l’étude des saintes Écritures, garde fidèlement, dans le dédale de la science, le fil conducteur de la doctrine des apôtres et de l’Église, vit conformément aux préceptes de l’Évangile et puise ses démonstrations dans la parole du Maître de la loi et des prophètes. Reposant ainsi sur la tradition de l’Église et s’en développant, la gnose n’est qu’une foi scientifique (ἐπιστημονιϰἡ πιστις). Les trois parties de son ouvrage, l’Exhortation aux Gentils, le Pédagogue et les Stromates, forment un enseignement moral et scientifique complet pour la conversion des païens, la consolidation des nouveaux convertis et l’instruction des gnostiques chrétiens. Il y fait preuve d’érudition et s’y montre plus souvent orateur que philosophe systématique. Malheureusement, dans les Stromates, son ouvrage principal, il n’a pas distingué la philosophie de la théologie, comme il en convient lui-même. Ces livres, dit-il, contiendront la vérité (chrétienne) mêlée aux doctrines de la philosophie, ou plutôt voilée par celles-ci, comme la coquille cache le fruit et sa semence. Les interprétations mystiques y sont par trop fréquentes, elles ne sont pas toujours heureuses, mais elles doivent être jugées d’après le goût dominant du siècle.

  1. Cf. Rom. I, 19, 26 ; II, 14.
  2. Clem. Alex. Strom. I, 20, p. 375-377, et I, 6, p. 336 : Ὰλλά ϰαθάπερ ϰαὶ ἄνευ γραμμάτων πιστὸν είναι δυνατόν φαμὲν οὔτως συνεῑναι τὰ ἐν τῃ πίστει γεγόμενα οὐχ οῒοντε, μὴ μαθόντα, ὁμολογοῡμεν.