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PREMIÈRE PÉRIODE

le plus de franchise, n’ayant l’esprit bandé qu’à mon but, qui n’estoit que d’advancer le dessein de mon frère, elle parée et toute couverte de pierreries et de broderies, avec une robille à l’espagnole de toille d’or noire, avec des bandes de broderie de canetille d’or et d’argent, et un pourpoint de toille d’argent blanche en broderie d’or avec des gros boutons de diamant (habit approprié à l’office de nourrice), l’on luy apporta à la table son petit fils emmaillotté aussi richement qu’estoit vestue la nourrice, pour lui donner à taicter.

Elle le met entre nous deux sur la table, et librement se desboutonne, baillant son tétin à son petit, ce qui eust esté tenu à incivilité à quelque autre ; mais elle le faisoit avec tant de grâce et de naifveté, comme toutes ses actions en estoient accompaignées, qu’elle en reçeust autant de louange que la compagnie de plaisir…

Les tables levées, le bal commença en la salle mesme où nous estions, qui esloit grande et belle…



ANNE DE ROHAN

(1580-1646)


Fille de René de Rohan et de Catherine de Parthenay[1], Anne de Rohan était d’un esprit très supérieur, comme celui de sa mère. Elle lisait cou-

  1. Voir page 42.