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ANTHOLOGIE FÉMININE

Déjà à cette époque se tenaient des salons de beaux esprits, et chez la Belle Cordière de Lyon se réunissaient les amateurs de littérature et de beaux-arts de la ville. Sainte-Beuve estime très haut la prose de Louise Labbé, et un de ses contemporains, Paradin, le doyen de Beaujeu, nous la dépeint ainsi dans ses Mémoires de l’histoire de Lyon, publiés en 1573 :

« Elle avoit la face plus angélique qu’humaine, mais ce n’estoit rien à la comparaison de son esprit tant chaste, tant vertueux, tant poétique, tant rare en savoir, qu’il sembloit qu’il eust esté créé de Dieu pour estre admiré comme un grand prodige entre les humains. »


SONNETS

I

Je vis, je meurs, je me brusle et me noye,
J’ai chaut extresme en endurant froidure,
La vie m’est et trop molle et trop dure ;
J’ai grans ennuis entremeslez de joye.

Tout à un coup je ris et me larmoye,
Et en plaisir maint grief tourment j’endure ;
Mon bien s’en va, et à jamais il dure ;
Tout en un coup je seiche et je verdoye.

Ainsi amour inconstamment me meine ;
Et quand je pense avoir plus de douleur,
Sans y penser je me treuve hors de peine.