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PREMIÈRE PÉRIODE

l’année écoulée. Elle allait commencer la seconde, quand une fois de plus la mort vint se mettre en travers de sa sécurité en prenant Philippe le Hardi, qui n’eut pas la joie de voir achever cet impérissable monument, élevé avec une indicible piété à l’inoubliable mémoire de son frère.

Christine de Pisan se ploya avec résignation devant l’implacable malheur qui ne se lassait pas de la poursuivre. Sa mère avait été rejoindre les aimés déjà partis, et « son cuer s’espanouissoit de joye quand elle songeait que le iour ne sausroit tarsder bien loing où elle si bieng isroit les restrouvez ».

Pendant le règne de Charles VII et l’invasion anglaise, aussi profondément ulcérée dans son patriotisme que dans ses affections, elle se retira dans un monastère. La France sauvée, elle ressaisit sa lyre pour saluer Jeanne d’Arc ; ce fut son chant du cygne[1] :

Chose est bien digne de mémoire
Que Dieu par une Vierge tendre
Sur France si grant grâce estendre.
Tu Johanne, de bonne heure née,
 Benoist[2] soit Ciel qui te créa.
 Par miracle fut envoïée
 Au roy pour sa provision ;
 Son fait n’est pas illusion,

  1. Voir Christine de Pisan, sa vie et ses œuvres, par M. Robineau.
  2. Béni.