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ANTHOLOGIE FÉMININE

un Olympe, des enfers et des cieux ; et le feu qui l’anime, mieux gardé par son génie que par le dieu des païens, ne trouva point dans l’Europe un Prométhée qui le ravît.

Pourquoi suis-je au Capitole ? pourquoi mon humble front va-t-il recevoir la couronne que Pétrarque a portée et qui reste suspendue au cyprès funèbre du Tasse ? pourquoi… si vous n’aimiez assez la gloire, ô mes concitoyens ! pour récompenser son culte autant que ses succès !

Eh bien ! si vous l’aimez, cette gloire qui choisit trop souvent ses victimes parmi les vainqueurs qu’elle a couronnés, pensez avec orgueil à ces siècles qui virent la renaissance des arts ! Le Dante, l’Homère des temps modernes, poète sacré de nos mystères religieux, héros de la pensée, plongea son génie dans le Styx pour aborder à l’enfer, et son âme fut profonde comme les abîmes qu’il a décrits.

L’Italie, au temps de sa puissance, revit tout entière dans le Dante. Animé par l’esprit des républiques, guerrier aussi bien que poète, il souffle la flamme des actions parmi les morts, et ses ombres ont une vie plus forte que les vivants d’aujourd’hui.

Les souvenirs de la terre les poursuivent encore ; leurs passions sans but s’acharnent à leur cœur ; elles s’agitent sur le passé, qui leur semble encore moins irrévocable que leur éternel avenir.

On dirait que le Dante, banni de son pays, a transporté dans les régions imaginaires les peines qui le