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TROISIÈME PÉRIODE

sur eux, la duchesse l’éloignait quelquefois. Elle écrivait pendant un de ces voyages forcés à Mademoiselle d’Orléans, son élève, ces lignes empreintes d’une affection réellement trop exaltée :


Quand ma chère amie recevra cette lettre, je serai bien rapprochée d’elle, et je ne m’en éloignerai plus. J’ai regretté mon enfant aujourd’hui encore plus qu’à l’ordinaire, s’il est possible, parce que ce pays est ravissant. Il n’y a pas de situations et d’environs comparables à ceux de Clermont. Rien au monde n’est plus singulier, plus pittoresque, plus frais et plus agréable. Nous rapportons à mon enfant une grappe de raisin pétrifiée dans une fontaine, et puis des pâtes d’abricots. Chère petite amie, je n’ai d’autre plaisir que celui de m’occuper de toi, que j’aime à la folie et que je porte partout dans mon cœur. J’ai au cou ton profil qui ne me quitte ni jour, ni nuit, et puis un portrait, jouant de la harpe, et puis un bracelet, et enfin ton portefeuille. Avec cela, la bonbonnière de ton ouvrage que j’ai mise dans ma poche le jour cruel de mon départ, tous les anneaux que tu m’a donnés pour ma montre, et ma jolie jarretière de cheveux à mon doigt. En outre, j’ai dans ma poche toutes tes charmantes petites lettres, que je relis toute la journée en voiture ; tout cela m’attendrit et m’occupe de la seule manière qui puisse m’être agréable.

Soignez-vous bien, mon doux Minon, Songez toujours qu’en vous dissipant, qu’en ménageant votre santé, c’est la mienne dont vous prenez soin. Bonsoir, fidèle et tendre amie. Je vous quitte parce qu’il est tard, et qu’il faudra demain