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ANTHOLOGIE FÉMININE

ample par le bas, avec une longue queue traînante et ornée de divers chiffons, suivant le goût ou la mode ; on me donnoit les miens en belles étoffes de soie, légères pour le dessin, modestes pour la couleur, mais de prix et de qualité pareils aux robes de ma mère. La toilette me coûtoit bien quelques chagrins, car on me faisoit souvent les cheveux avec des papillotes, des fers chauds, tout l’attirail ridicule et barbare dont on se servoit dans ce temps-là ; j’avois la tête extrêmement sensible, et le tiraillement qu’il falloit souffrir était si douloureux qu’une grande coiffure me faisoit toujours verser des larmes arrachées par la souffrance, sans être accompagnées de plaintes.

Il me semble que j’entends demander pour quels yeux étoit cette toilette dans la vie retirée que je menois. Ceux qui feroient cette question doivent se rappeler que je sortois deux fois la semaine ; et s’ils avoient connu les mœurs de ce qu’on appeloit les bourgeois de Paris de mon temps, ils sauroient qu’il en existoit des milliers dont la dépense, assez grande en parure, avoit pour objet une représentation de quelques heures aux Tuileries tous les dimanches ; leurs femmes y joignoient celle de l’église, et le plaisir de traverser doucement leur quartier sous les yeux du voisinage. Joignez à cela les visites de famille aux grandes époques des fêtes et du premier de l’an, une noce, un baptême, et vous verrez assez d’occasions d’exercer la vanité. Au reste, on pourra remarquer dans mon éducation plus d’un contraste. Cette petite personne, qui paroissoit le dimanche à l’église et à la promenade dans