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DEUXIÈME PÉRIODE

une foule de mots et ne saisissant pas du tout l’esprit de M. de Marivaux. Mme Riccoboni écoutait, se taisait, et ne prenait aucune part à la dispute. Restée seule, elle parcourut deux ou trois parties de Marianne, s’assit à son secrétaire et fit une suite à ce roman. Deux jours après la conversation, elle la montra, sans en nommer l’auteur ; on la lut en présence de M. de Saint-Foix ; il l’entendit avec tant de surprise qu’il crut le manuscrit dérobé à M. de Marivaux. Il voulait le faire imprimer ; Mme Riccoboni s’y opposa, dans la crainte de désobliger M. de Marivaux. Dix ans après, cette suite parut dans un journal dont le rédacteur eut la permission de M. de Marivaux pour l’y insérer[1].

Telle est, sinon de la main, du moins d’après les confidences, et sous la dictée pour ainsi dire de Mme Riccoboni, l’histoire exacte de cette Suite au roman de Marivaux, qui ne devait pas être une Fin : car une des conditions que s’était imposées l’imitatrice, c’était de ne pas faire avancer le récit. Elle y réussit à merveille, au point que Grimm dit dans sa Correspondance :

« C’est une imitation parfaite de la manière de Marivaux, mais d’un bien meilleur goût. Si vous avez vu Arlequin courir la poste dans je ne sais quelle farce, vous aurez une idée très exacte de

  1. Œuvres de Mme Riccoboni, in-18, 1826, t. II.