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DEUXIÈME PÉRIODE

Lady Violente.

Voilà justement ce que je pensé : par exemple, une des lois de Sparte était d’accoutumer les enfants à mépriser la douleur : cela est fort bien ; mais pour leur faire prendre cette bonne habitude, il y avait certains jours de fête où on les menait dans les temples pour les fouetter jusqu’au sang, sans qu’ils eussent fait aucune faute : encore il ne fallait pas pleurer. Un enfant qui aurait pleuré aurait perdu sa réputation ; aussi est-il arrivé plusieurs fois que ces malheureux enfants sont morts sous les coups sans jeter une larme ; et, ce qu’il y a de plus abominable, c’est que les pères et les mères étaient là : ils voyaient tranquillement déchirer leurs pauvres enfants et les exhortaient à souffrir sans se plaindre.

Mademoiselle Bonne.

Voilà une raison sans réplique, et un motif légitime pour les jeunes dames de haïr les Lacédémoniens. J’avoue aussi que je n’ai rien à répliquer à lady Spirituelle. Pour que l’obéissance aux lois soit une vertu, il faut que ces lois soient bonnes ; si elles sont mauvaises, plus on est exact à les observer, plus on est méchant.

Miss Belotte.

Pour moi, je n’y fais pas tant de façons : d’abord que les choses me plaisent, je les crois bonnes ; si elles me déplaisent, je dis d’abord qu’elles ne valent rien.

Mademoiselle Bonne.

C’est le moyen de juger tout de travers. J’espère que vous n’agirez pas ainsi à l’avenir. Vous avez beaucoup d’esprit, ma chère, et même un esprit supérieur : il n’est