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DEUXIÈME PÉRIODE

En les voyant être heureux sans richesse,
Habiles sans étude, équitables sans lois,
 Qu’ils possèdent seuls la sagesse ?
Il n’en est presque point dont l’homme n’ait reçu
Des leçons qui l’ont fait rougir de sa faiblesse,
Et, quoiqu’il s’applaudisse, il doit à leur adresse
Plus d’un art que, sans eux, il n’aurait jamais su.


LE BEL ESPRIT

Le bel esprit, au siècle de Marot,
Des dons du Ciel passoit pour le gros lot ;
Des grands seigneurs il donnoit accointance,
Menoit parfois à noble jouissance.
Et, qui plus est, faisoit bouillir le pot.

Or, est passé ce temps où d’un bon mot,
Stance ou dizain, on payoit son écot :
Plus n’en voyons qui prennent pour finance
   Le bel esprit.

À prix d’argeut, l’auteur, comme le sot.
Boit sa chopine et mange son gigot ;
Heureux encor d’en avoir suffisance !
Maints ont le chef plus rempli que la panse.
Dame Ignorance a fait enfin capot
   Le bel esprit.