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PLANTES CULTIVÉES POUR LEURS TIGES OU FEUILLES

région méditerranéenne, le Cichorium pumilum, Jacquin (C. divaricatum, Schousboe), et les différences ont été trouvées si légères que les uns ont soupçonné, les autres ont affirmé l’identité spécifique. Quant à moi, après avoir vu des échantillons sauvages, de Sicile, et comparé les bonnes figures publiées par Reichenbach (Icones, vol. 19, pl. 1357 et 1358), je n’ai aucune objection à prendre les Endives cultivées pour des variétés de la même espèce que le C. pumilum. Dans ce cas, le nom le plus ancien étant C. Endivia, c’est celui qu’on doit conserver, comme l’a fait Schultz. Il rappelle d’ailleurs un nom vulgaire commun à plusieurs langues.

La plante spontanée existe dans toute la région dont la Méditerranée est le centre, depuis Madère[1], le Maroc[2] et l’Algérie[3], jusqu’à la Palestine[4], le Caucase et le Turkestan[5]. Elle est commune surtout dans les îles de la Méditerranée et en Grèce. Du côté ouest, par exemple en Espagne et à Madère, il est probable qu’elle s’est naturalisée par un effet des cultures, d’après les stations qu’elle occupe dans les champs et au bord des routes.

On ne trouve pas, dans les textes anciens, une preuve positive de l’emploi de cette plante chez les Grecs et les Romains[6] ; mais il est probable qu’ils s’en servaient comme de plusieurs autres Chicoracées. Les noms vulgaires n’indiquent rien, parce qu’ils ont pu s’appliquer aux deux espèces de Cichorium. Ils sont peu variés[7] et font présumer une culture sortie du milieu gréco-romain. On cite un nom hindou, Kasni, et tamul, Koschi[8], mais aucun nom sanscrit, ce qui indique une extension tardive de la culture dans l’est.

Épinard. — Spinacia oleracea, Linné.

Ce légume était inconnu aux Grecs et aux Romains[9]. Il était nouveau en Europe au XVIe siècle[10], et l’on a discuté pour savoir s’il devait s’appeler Spanachia, comme venant d’Espagne, ou Spinacia, à cause des épines du fruit[11]. La suite a montré que le nom vient de l’arabe Isfânâdsch, Esbanach ou Sebanach, suivant les auteurs[12]. Les Persans disent Ispany ou Ispanaj[13], et

  1. Lowe, Flora of Madeira, p. 521.
  2. Ball, Spicileg., p. 534.
  3. Munby, Cat., éd. 2, p. 21.
  4. Boissier, l. c.
  5. Bunge, Beitr. zur flora Russland’s und Central-Asien’s, p. 197.
  6. Lenz, Botanik der Alten, p. 483, cite les passages des auteurs. Voir aussi Heldreich, Die Nutzpflanzen GriechenL, p. 74.
  7. Nemnich, Polygl. Lexic., au mot Cichorium Endivia.
  8. Royle, Ill. Himal., p. 247 ; Piddington, Index.
  9. J. Bauhin, Hist., II, p. 964 ; Fraas, Syn. fl. class. ; Lenz, Bot. d. Alten.
  10. Brassavola, p. 176.
  11. Mathioli, éd. Valgr. p. 343.
  12. Ebn Baithar, ueberttz von Sondtheimer, I, p. 34 ; Forskal, Egypt, p. 77 ; Delile, ///. Ægypt., , p. 29.
  13. Roxburgh, Fl. ind., éd. 1832, v. III, p. 771, appliqué au Spinacia tetrandra, qui paraît la même espèce.