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PLANTES CULTIVÉES POUR LEURS PARTIES SOUTERRAINES

Les deux plantes sont très différentes, surtout par la fleur. L’une est une Aracée, l’autre une Nymphéacée ; l’une est de la classe des Monocotylédones, l’autre des Dicotylédones. Le Nelumbium, originaire de l’Inde, a cessé de vivre en Égypte, tandis que la Colocase des botanistes modernes s’est conservée. S’il y a eu confusion chez les auteurs grecs, comme cela paraît probable, il faut l’expliquer par le fait que le Colcas fleurit rarement, du moins en Égypte. Au point de vue de la nomenclature botanique il importe peu qu’on se soit trompé jadis sur les plantes qui devaient s’appeler Colocase. Heureusement, les noms scientifiques modernes ne s’appuient pas sur les définitions douteuses des anciens, et il suffit de dire aujourd’hui, si l’on tient aux étymologies, que Colocasia vient de Colcas, à la suite d’une erreur.

Alocase à grande racine. — Alocasia macrorrhiza Schott. — Arum macrorrhizum, Linné (Fl. Zeyl., 327).

Cette Aracée, que Schott rapportait tantôt au genre Colocasia et tantôt à l’Alocasia, et dont la synonymie est bien plus compliquée qu’il ne semble d’après les noms indiqués ci-dessus[1], est cultivée moins souvent que la Colocase ordinaire, mais de la même façon et à peu près dans les mêmes pays. Ses rhizomes atteignent la longueur d’un bras. Ils ont une saveur acre bien prononcée, qu’il est indispensable de faire disparaître au moyen de la cuisson.

Les indigènes d’0-Taïti la nomment Apé et ceux des îles des Amis Kappe[2]. A Ceylan, le nom vulgaire est Habara, d’après Thwaites[3]. Elle a d’autres noms dans l’archipel indien, ce qui fait présumer une existence plus ancienne que les peuples actuels de ces régions.

La plante paraît sauvage surtout dans l’île d’0-Taïti[4]. Elle l’est aussi à Ceylan, d’après M. Thwaites, qui a herborisé longtemps dans cette île. On l’indique encore dans l’Inde[5] et même en Australie[6], mais sans affirmer la qualité de plante sauvage, toujours difficile à établir pour une espèce cultivée au bord des ruisseaux et qui se propage par caïeux. En outre, elle est quelquefois confondue avec le Colocasia indica Kunth, qui végète de la même manière, qu’on trouve çà et là dans les cultures, et qui se voit, spontanée ou naturalisée, dans les fossés ou les ruisseaux de l’Asie méridionale, sans que son histoire soit encore bien connue.

  1. Voir Engler, dans nos Monographiæ Phanerogarum, 2, p. 502.
  2. Forster, De plantis esculentis insularum Oceani australis, p. 58.
  3. Thwaites, Enum. plant. Zeyl., 336.
  4. Nadeaud, Enum. des plantes indigènes, p. 40.
  5. Engler, l. c.
  6. Bentham, Flora austral., 8, p. 155.