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OBSERVATIONS GÉNÉRALES

suivent cette voie. Ils devraient consulter les caractères, plus fixes, des organes pour lesquels on ne cultive pas les espèces.

5o  Une espèce non cultivée étant un groupe de formes plus ou moins analogues, parmi lesquelles on peut distinguer souvent des groupes subordonnés (races, variétés, sous-variétés), il a pu arriver qu’on ait mis en culture deux ou plusieurs de ces formes un peu différentes. C’est ce qui a dû se passer surtout quand l’habitation d’une espèce est vaste, et plus encore quand elle est disjointe. Le premier cas est probablement celui des Choux (Brassica), du Lin, du Cerisier des Oiseaux (Prunus avium), du Poirier commun, etc. Le second s’est présenté probablement pour la Gourde, le Melon et le Haricot trilobé, qui existaient à la fois dans l’Inde et l’Afrique, avant la culture.

6o  On ne connaît pas de caractère distinctif entre une plante naturalisée issue, depuis quelques générations, de pieds cultivés, et une plante sauvage issue de pieds anciennement sauvages. Toutefois, dans la transition de plante cultivée à plante spontanée, les traits particuliers qui se propagent par la greffe dans les cultures ne se conservent pas de semis. Par exemple, l’Olivier devenu sauvage est à l’état d’Oleaster, le Poirier a des fruits moins gros, le Châtaignier marron donne un fruit tout ordinaire. Du reste, on n’a pas encore observé suffisamment, de génération en génération, les formes naturalisées d’espèces sorties des cultures. M. Sagot[1] l’a fait pour la vigne. Il serait intéressant de comparer de la même manière avec leurs formes cultivées les Citrus, le Persica et le Cardon naturalisés en Amérique, loin de leur pays d’origine, de même que l’Agave et la Figue d’Inde sauvages en Amérique avec leurs variétés naturalisées dans l’ancien, monde. On saurait exactement ce qui persiste après un état temporaire de culture.

7o  Une espèce peut avoir eu avant la culture une habitation restreinte et occuper ensuite une immense étendue comme plante cultivée et quelquefois naturalisée.

8o  Dans l’histoire des végétaux cultivés, je n’ai aperçu aucun indice de communications entre les peuples de l’ancien et du nouveau monde avant la découverte de l’Amérique par Colomb. Les Scandinaves, qui avaient poussé leurs excursions jusque dans le nord des États-Unis, et les Basques du moyen âge, qui avaient suivi des baleines peut-être jusqu’en Amérique, ne paraissent pas avoir transporté une seule espèce cultivée. Le courant du Gulf-Stream n’a produit également aucun effet. Entre l’Amérique et l’Asie, deux transports de plantes utiles ont peut-être eu lieu, l’un par l’homme (Batate), l’autre par l’homme ou par la mer (Cocotier).

FIN.
  1. Sagot, Sur une vigne sauvage croissant en abondance dans les bois autour de Belley.