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PLANTES CULTIVÉES POUR LEURS GRAINES

en Italie c’est pour l’huile contenue dans la graine. Cette huile, plus ou moins purgative, sert à l’éclairage au Bengale et ailleurs.

Dans aucune région le Ricin n’a été trouvé spontané d’une manière aussi certaine qu’en Abyssinie, dans le Sennaar et le Cordofan. Les expressions des auteurs ou collecteurs sont catégoriques. Le Ricin est commun dans les endroits rocailleux de la vallée de Chiré, près de Goumalo, dit Quartin Dillon ; il est spontané dans les localités du Sennaar supérieur qui sont inondées pendant les pluies, dit Hartmann[1]. Je possède un échantillon de Kotschy, n° 243, recueilli du côté septentrional du mont Kohn, en Cordofan. Les indications des voyageurs au Mozambique et sur la côte opposée de Guinée ne sont pas aussi claires, mais il est très possible que l’habitation spontanée s’étende sur une grande partie de l’Afrique tropicale. Comme il s’agit d’une espèce utile, très apparente et facile à propager, les nègres ont dû la répandre depuis longtemps. Toutefois, quand on se rapproche de la mer Méditerranée, il n’est plus question d’indigénat. Déjà, pour l’Égypte, MM. Schweinfurth et Ascherson[2] disent l’espèce seulement cultivée et naturalisée. Probablement en Algérie, en Sardaigne, au Maroc, et même aux îles Canaries, où elle se voit surtout dans les sables au bord de la mer, elle est naturalisée depuis des siècles.

J’en dirai autant des échantillons rapportés de Djedda, en Arabie, par Schimper, qui ont été recueillis près d’une citerne. Forskal[3] a cependant recueilli le Ricin dans les montagnes de l’Arabie Heureuse, ce qui peut signifier une station spontanée. M. Boissier[4] l’indique dans le Belouchistan et la Perse méridionale, mais comme « subspontané », de même qu’en Syrie, Anatolie et Grèce.

Rheede[5] parle du Ricin comme cultivé au Malabar et croissant dans les sables, mais les auteurs modernes anglo-indiens n’admettent nullement la spontanéité. Plusieurs passent l’espèce sous silence. Quelques-uns parlent de la facilité de naturalisation hors des cultures. Loureiro avait vu le Ricin en Cochinchine et en Chine, « cultivé et non cultivé », ce qui signifie peut-être échappé des cultures. Enfin, pour les îles de la Sonde, Rumphius[6] est, comme toujours, un des plus intéressants à consulter, « Le Ricin, dit-il, croit surtout à Java, où il constitue d’immenses champs et produit une grande quantité d’huile. À Amboine, on le plante çà et là près des habitations et dans les

  1. Richard, Tentamen florse abyssinicæ, 2, p. 250 ; Schweinfurth, Plantæ niloticæ a Hartmann, etc., p. 13.
  2. Schweinfurth et Ascherson, Aufzählung, p. 262.
  3. Forskal, Fl. arab., p. 71.
  4. Boissier, Fl. orient., 4, p. 1143.
  5. Rheede, Malabar, 2, p. 57, t. 32.
  6. Rumphius, Herb. Amboin., vol. 4, p. 93.