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CAFÉIER

Toutes les flores récentes d’Asie et d’Afrique mentionnent l’espèce comme cultivée, et la plupart des auteurs pensent qu’elle est d’origine américaine. M. Bentham, après avoir constaté qu’on ne l’a pas trouvée sauvage en Amérique ou ailleurs, ajoute qu’elle est peut-être une forme dérivée d’une des six autres espèces du genre spontanées au Brésil, mais il n’indique pas de laquelle. C’est assez probable, car une plante douée d’un moyen efficace et très particulier de germer ne paraît pas de nature à s’éteindre. On l’aurait trouvée sauvage au Brésil, dans le même état que la plante cultivée, si cette dernière n’était pas un produit de la culture. Les ouvrages sur la Guyane et autres régions de l’Amérique indiquent l’espèce comme cultivée. Grisebach[1] nous dit en outre que dans plusieurs des îles Antilles elle se naturalise hors des cultures.

Un genre dont toutes les espèces bien connues sont ainsi cantonnées dans une seule région de l’Amérique ne peut guère avoir une espèce commune entre le nouveau monde et l’ancien. Ce serait une exception par trop forte aux données ordinaires de la géographie botanique. Mais alors comment l’espèce (ou forme cultivée) a-t-elle passé du continent américaine l’ancien monde ? C’est ce qu’on ne peut guère deviner. Je ne suis pas éloigné de croire à un transport du Brésil en Guinée par les premiers négriers, et à d’autres transports du Brésil aux îles du midi de l’Asie par les Portugais depuis la fin du XVe siècle.

Caféier. — Coffea arabica, Linné. Ce petit arbre, de la famille des Rubiacées, est sauvage en Abyssinie[2], dans le Soudan[3] et sur les deux côtes opposées de Guinée et Mozambique[4]. Peut-être, dans ces dernières localités, éloignées du centre, s’est-il naturalisé à la suite des cultures. Personne ne l’a encore trouvé en Arabie, mais cela peut s’expliquer par la difficulté de pénétrer dans l’intérieur du pays. Si on l’y découvre, on aura de la peine à constater la qualité spontanée, car les graines, qui perdent vite leur faculté de germer, lèvent souvent autour des cultures et naturalisent l’espèce. Cela s’est vu au Brésil et aux Antilles[5], où l’on est sûr que le Caféier n’a jamais été indigène.

L’usage du café paraît fort ancien en Abyssinie. Shehabeddin Ben, auteur d’un manuscrit arabe du XVe siècle (n° 944 de la Bibl. de Paris), cité dans l’excellente dissertation de John Ellis[6],

  1. Grisebach, Flora of brit. W. Indian islands, p. 189.
  2. Richard, Tentamen fl. abyss., 1, p. 349 ; Oliver, Flora of tropical Africa, 3, p. 180.
  3. Ritter, cité dans Flora, 1846, p. 704.
  4. Meyen, Géogr. bot., traduction anglaise, p. 384 ; Grisebach, Flora of british W. India islands, p. 338.
  5. H. Welter, Essai sur l’histoire du café, 1 vol. in-8o, Paris, 1868.
  6. Ellis, An historical account of Coffee, 1774.