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PAVOT

occupaient l’Amérique centrale et le Yucatan. Ceux-ci eurent souvent des conflits du côté du nord avec les Nahuas, prédécesseurs au Mexique des Toltecs et des Aztecs. Une tradition porte que Nahualt, chef des Nahuas, enseignait la culture du Maïs[1].

Je n’ose pas espérer qu’on découvre du Maïs sauvage, quoique son habitation préculturale fût probablement si petite que les botanistes ne l’ont peut-être pas encore rencontrée. L’espèce est tellement distincte de toutes les autres et si apparente que les indigènes ou des colons peu instruits l’auraient remarquée et en auraient parlé. La certitude sur l’origine viendra plutôt de découvertes archéologiques. Si l’on étudie un plus grand nombre d’anciens monuments dans toutes les parties de l’Amérique, si l’on parvient à déchiffrer les inscriptions hiéroglyphiques de quelques-uns d’entre eux, et si l’on arrive à connaître les dates des migrations et des faits économiques, notre hypothèse sera justifiée, modifiée ou renversée.

Art. 2Graines servant à divers usages.

Pavot. — Papaver somniferum, Linné.

On cultive le Pavot ordinairement pour l’huile, dite huile d’œillette, produite par les graines, et quelquefois, surtout en Asie, pour le suc, qu’on extrait en incisant les capsules et qui fournit l’opium.

La forme cultivée depuis des siècles s’échappe facilement hors des cultures, ou se naturalise à peu près dans certaines localités du midi de l’Europe[2]. On ne peut pas dire qu’elle existe à l’état vraiment sauvage, mais les botanistes s’accordent à la considérer comme une modification du Pavot appelé Papaver setigerum, qui est spontané dans la région de la mer Méditerranée, notamment en Espagne, en Algérie, en Corse, en Sicile, en Grèce et dans l’île de Chypre. On ne l’a pas rencontré dans l’Asie orientale[3] ; par conséquent, si c’est bien l’origine de la forme cultivée, la culture doit avoir commencé en Europe ou dans l’Afrique septentrionale.

A l’appui de cette réflexion, il se trouve que les lacustres de l’âge de pierre, en Suisse, cultivaient un Pavot qui se rapproche plus du P. setigerum que du somniferum. M. Heer[4] n’a pas pu découvrir ses feuilles, mais la capsule est surmontée de huit stig-

  1. De Nadaillac, 2, p. 69, qui cite l’ouvrage classique de Bancroft, The native races of the Pacific states.
  2. Willkomm et Lange, Prodr. fl. hisp., 3, p. 872.
  3. Boissier, Fl. orient. ; Tchihatcheff, Asie mineure ; Ledebour, Fl. rossica, et autres.
  4. Heer, Pflanzen der Pfahlbauten, p. 32, fig. 65, 66.