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SORGHO SUCRÉ

se serait répandue tardivement vers l’ouest. Mais les anciens Égyptiens la possédaient, et l’on se demande alors comment ils l’auraient reçue de Chine sans que les peuples intermédiaires en aient eu connaissance ? Il est plus facile de comprendre l’indigénat dans l’Afrique équatoriale, avec transmission préhistorique en Égypte, dans l’Inde et finalement en Chine, où la culture ne paraît pas très ancienne, car le premier ouvrage qui en parle date du IVe siècle de notre ère. À l’appui d’une origine africaine, je citerai l’observation de Schmidt[1] que l’espèce abonde dans l’île San Antonio de l’archipel du Cap-Vert, dans des localités rocailleuses. Il la croit « complètement naturalisée », ce qui peut-être cache une véritable origine.

Sorgho sucré.Holcus saccharatus, Linné. — Andropogon saccharatus, Roxburgh. — Sorghum saccharatum, Persoon.

Cette espèce, plus haute que le Sorgho ordinaire, et à panicule diffuse[2], est cultivée dans les pays tropicaux pour le grain, qui ne vaut cependant pas celui du Sorgho ordinaire, et dans les régions moins chaudes comme fourrage, ou même pour le sucre assez abondant que renferme la tige. Les Chinois en tirent de l’alcool, mais non du sucre.

L’opinion des botanistes et du public la fait venir de l’Inde ; mais, d’après Roxburgh, elle est seulement cultivée dans cette région. Il en est de même aux îles de la Sonde, où le Battari est bien l’espèce actuelle. C’est le Kao-liang (grand Millet) des Chinois. On ne le dit pas spontané en Chine. Il n’est pas mentionné dans les auteurs plus anciens que l’ère chrétienne[3]. D’après ces divers témoignages et l’absence de tout nom sanscrit, l’origine asiatique me paraît une illusion.

La plante est cultivée maintenant en Égypte moins que le Sorgho ordinaire, et en Arabie, sous le nom de Dochna ou Dochn, Aucun botaniste ne l’a vue spontanée dans ces pays[4]. On n’a pas de preuve que les anciens Égyptiens l’aient cultivée. Hérodote[5] a parlé d’un Millet en arbre, des plaines d’Assyrie. Ce pourrait être l’espèce actuelle, mais comment le prouver ?

Les Grecs et les Latins n’en avaient pas connaissance, du moins avant l’époque de l’empire romain, mais il est possible que ce fût le Millet, haut de sept pieds, dont Pline fait mention[6] comme ayant été introduit de l’Inde, de son vivant.

  1. Schmidt, Beiträge zur Flora capverdischen Inseln, p. 158.
  2. Voir Host, Gramineæ austriacæ, vol. 4, pl. 4.
  3. Roxburgh, Fl. ind. éd. 2, vol. 1, p. 271 ; Rumphius, Amboin., 5, p. 194. pl. 75, fig. 1 ; Miquel, Fl. indo-batava, 3, p. 503 ; Bretschneider, On the value, etc., p. 9 et 46 ; Loureiro, Fl. cochinch., 2, p. 792.
  4. Forskal, Delile, Schweinfarth et Ascherson, l. c.
  5. Hérodote, l. 1, c. 193.
  6. Pline, Hist., l. 18, c. 7. Ce pourrait être aussi la variété ou espèce appelée bicolor.