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AVOINE ORDINAIRE ET AVOINE D’ORIENT

austral qu’il faut chercher la patrie de l’espèce, mais évidemment dans les pays de l’hémisphère boréal où on l’a cultivée anciennement. Voyons si elle s’y trouve encore dans un état spontané.

L’Avoine se sème dans les décombres, au bord des chemins et près des endroits cultivés, plus facilement que les autres céréales, et se maintient quelquefois de manière à sembler spontanée. Cette remarque a été faite dans des localités très éloignées, comme l’Algérie et le Japon, Paris et le nord de la Chine[1]. Ce genre de faits doit nous rendre sceptiques sur l’Avoine que Bové dit avoir trouvée dans le désert du mont Sinaï. On a prétendu aussi[2] que le voyageur Olivier avait vu l’Avoine sauvage en Perse, mais il n’en parle pas dans son ouvrage. D’ailleurs plusieurs espèces annuelles qui ressemblent beaucoup à l’Avoine ordinaire peuvent tromper un voyageur. Je ne puis découvrir ni dans les livres ni dans les herbiers l’existence de pieds vraiment spontanés, soit en Asie, soit en Europe, et M. Bentham m’a certifié qu’il n’y en a pas dans les riches herbiers de Kew ; mais certainement, comme pour les formes dont je parlerai tout à l’heure, la condition quasi spontanée ou quasi naturalisée est plus fréquente dans les États autrichiens, de Dalmatie en Transylvanie[3], que nulle part ailleurs. C’est une indication de l’origine, à ajouter aux probabilités historiques et linguistiques en faveur de l’Europe orientale tempérée.

L’Avena strigosa, Schreber, paraît une forme de l’Avoine ordinaire, d’après des expériences de culture dont parle M. Bentham, en ajoutant, il est vrai, qu’elles méritent confirmation[4]. On peut voir une bonne figure de cette plante dans Host, Icones Graminum austriacorum, 2, pl. 56, qui est intéressante à comparer avec la pl. 59 de l’A. sativa. Du reste, l’Avena strigosa n’a pas été trouvée à l’état spontané. Elle est en Europe dans les champs abandonnés, ce qui appuie l’hypothèse d’une forme dérivée, par suite de la culture.

L’Avena orientalis, Schreber, dont les épillets penchent d’un seul côté, est aussi cultivée en Europe depuis la fin du XVIIIe siècle. On ne la connaît pas à l’état spontané. Mélangée souvent avec l’Avoine ordinaire, elle se distingue au premier coup d’œil. Les noms qu’elle porte en Allemagne, Avoine de Turquie ou de Hongrie, montrent une introduction moderne venant de l’est. Host en a donné une excellente figure (Gram. austr., 1, pl. 44).

  1. Munby, Catal. Alger., éd. 2, p. 36 ; Franchet et Savatier, Enum. plant. Jap., 2, p. 175 ; Cosson ; Fl. Paris, 2. p. 637 ; Bunge, Enum. chin., p. 71, pour la variété nuda.
  2. Lamarck, Dict. encycl., 1, p. 331.
  3. Visiani, Fl. dalmat., 1, p. 69 ; Host, Fl. austr., 1, p. 133 ; Neilreich, Fl. Wien., p. 85 ; Baumgarten, Enum. Transylv., 3, p. 259 ; Farkas, Fl. croatica, p. 1277.
  4. Bentham, Handbook of british flora, éd. 4, p. 544.