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L'ÉPEAUTRE

modernes dans les tombeaux (même du Maïs, plante américaine ! ), soit des employés de l’honorable comte de Sternberg. Les graines répandues dans le commerce sous le nom de Blé de momie n’ont été accompagnées d’aucune preuve quant à l’ancienneté d’origine.

Épeautre et formes ou espèces voisines[1].

Louis Vilmorin[2], à l’imitation de Seringe dans son excellent travail sur les Céréales[3], a réuni en un groupe les blés dont les grains, à maturité, sont étroitement contenus dans leur enveloppe, ce qui oblige à faire une opération spéciale pour les en dégager, — caractère plus agricole que botanique. Il énumère ensuite les formes de ces blés vêtus, sous trois noms, qui répondent à autant d’espèces de la plupart des botanistes.

I. Épeautre, Grande Épeautre. — Triticum Spelta, Linné,

L’Épeautre n’est plus guère cultivé que dans le midi de l’Allemagne et la Suisse allemande. Autrefois, il n’en était pas de même.

Les descriptions de céréales par les auteurs grecs sont tellement brèves et insignifiantes qu’on peut toujours hésiter sur le sens des noms qu’ils emploient. Cependant, d’après les usages dont ils parlent, les érudits[4] estiment que les Grecs ont appelé l’Épeautre d’abord Olyra, ensuite Zeia, noms qui se trouvent dans Hérodote et Homère. Dioscoride[5] distingue deux sortes de Zeia, qui paraissent répondre aux Triticum Spelta et Tr. monococcum. On croit que l’Épeautre était le Semen (grain par excellence) et le Far, de Pline, dont il dit que les Latins se sont nourris pendant 360 ans, avant de savoir confectionner du pain[6]. Comme l’Épeautre n’a pas été trouvé chez les lacustres de Suisse ou d’Italie, et que les premiers cultivaient des formes voisines, appelées Tr. dicoccum et Tr. monococcum[7] il est possible que le Far des Latins fut plutôt une de celle-ci.

L’existence du véritable Épeautre dans l’ancienne Égypte et dans les pays voisins me paraît encore plus douteuse. L’Olyra des Égyptiens, dont parle Hérodote, n’était pas l’Olyra des Grecs. Quelques auteurs ont supposé que c’était le riz, Oryza[8]. Quant à l’Épeautre, c’est une plante qu’on ne cultive pas dans des pays aussi chauds. Les modernes, depuis Rauwolf jusqu’à nos jours,

  1. Voir les planches de Metzger et de Host, dans les ouvrages cités tout à l’heure.
  2. Essai d’un catalogue méthodique des froments, Paris, 1850.
  3. Seringe, Monographie des céréales de la Suisse, in-8o, Berne, 1818.
  4. Fraas, Synopsis fl. class., p. 307 ; Lenz, Botanik d. Alten, p. 257.
  5. Dioscorides, Mat. med., 2, 111-115.
  6. Pline, Hist., I. 18, c. 7 ; Targioni, Cenni storici, p. 6.
  7. Heer, l. c. p. 6 ; Unger, Pflanzen d. alten Ægypt., p. 32.
  8. Delile, Plantes cultivées en Égypte, p. 5.