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BLÉ DE POLOGNE

du Parmesan[1]. Du reste, M. Heer[2] regarde cette forme comme une race du froment ordinaire, et M. Sordelli paraît incliner vers la même opinion.

Fraas soupçonne que le Krithanias de Théophraste était le Triticum turgidum, mais ceci est absolument incertain. D’après M. de Heldreich[3], le Gros blé est d’introduction moderne en Grèce. Pline[4] a parlé brièvement d’un blé à épis rameux, donnant cent grains, qui devait être notre Blé de miracle.

Ainsi les documents historiques et linguistiques concourent à faire regarder les formes du Triticum turgidum comme des modifications du froment ordinaire, obtenues dans les cultures. La forme à épis rameux ne remonte peut-être pas beaucoup plus haut que l’époque de Pline.

Ces déductions seraient mises à néant si l’on découvrait le Triticum turgidum à l’état sauvage, ce qui n’est pas encore arrivé d’une manière certaine. Malgré C. Koch[5], personne n’admet qu’il croisse, hors des cultures, à Constantinople et dans l’Asie Mineure. L’herbier de M. Boissier, si riche en plantes d’Orient, n’en possède pas. Il est indiqué comme spontané en Égypte par MM. Schweinfurth et Ascherson, mais c’est par suite d’une erreur typographique[6].

III. Blé dur. — Triticum durum, Desfontaines.

Cultivé depuis longtemps en Barbarie, dans le midi de la Suisse et quelquefois ailleurs, il n’a jamais été trouvé à l’état sauvage.

Dans les différentes provinces d’Espagne, il ne porte pas moins d’une quinzaine de noms[7], et aucun ne dérive du nom arabe Quemah, usité en Algérie[8] et en Égypte[9]. L’absence de noms dans plusieurs autres pays et surtout de noms originaux est bien frappante. C’est un indice de plus en faveur d’une dérivation du froment ordinaire, obtenue en Espagne et dans le nord de l’Afrique, à une époque inconnue, peut-être depuis l’ère chrétienne.

IV. Blé de Pologne.Triticum polonicum, Linné.

Cet autre blé dur, à grains encore plus allongés, cultivé surtout dans l’Europe orientale, n’a pas été trouvé sauvage.

  1. Cités d’après Sordelli, Notizie sull. Lagozza, p. 32.
  2. Heer, l. c., p. 50.
  3. Heldreich, Die Nutzpflanzen Griechenlands, p. 5.
  4. Pline, Hist., l. 18, c. 10.
  5. Koch, Linnæa, 21, p. 427.
  6. Lettre de M. Ascherson, en 1881.
  7. Dictionn. manuscrit des noms vulgaires.
  8. Debeaux, Catal. des plantes de Boghar, p. 110.
  9. D’après Delile, l. c., le blé se nomme Qamh, et un blé corné, rouge, Qamh-ahmar.