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PLANTES CULTIVÉES POUR LEURS GRAINES

ces variétés comme venant d’Italie, et Targioni[1] nous apprend que le nom marrone ou marone était usité dans ce pays déjà au moyen âge (en 1170).

Froment et formes ou espèces voisines.

Les innombrables races de blé proprement dit, dont les grains se détachent naturellement à maturité de leur enveloppe, ont été classées par Vilmorin[2] en quatre groupes, qui constituent suivant les auteurs des espèces distinctes ou des modifications du froment ordinaire. Je suis obligé de les distinguer pour l’étude de leur histoire, mais celle-ci, comme on le verra, appuie l’opinion d’une espèce unique[3].

I. Froment ordinaire. — Triticum vulgare, Villars. — Triticum hybernum et Tr. æstivum, Linné.

D’après les expériences de l’abbé Rozier et, plus tard, de Tessier, la distinction des blés d’automne et de mars n’a pas d’importance. « Tous les froments, dit ce dernier agronome[4], suivant les pays, sont ou de mars ou d’automne. Ils passent tous, avec le temps, à l’état de blé d’automne ou de blé de mars, comme je m’en suis assuré. Il ne s’agit que de les y accoutumer peu à peu, en semant graduellement plus tard qu’on ne le fait les blés d’automne et plus tôt les blés de mars ». Le fait est que, dans le nombre immense des races de blé que l’on cultive, quelques-unes souffrent davantage des froids de l’hiver, et alors l’habitude s’est établie de les semer au printemps[5]. Pour la question d’origine, nous n’avons guère à nous occuper de ces distinctions, d’autant plus que la plupart des races obtenues remontent à des temps très reculés.

La culture du froment peut être qualifiée de préhistorique dans l’ancien monde. De très vieux monuments de l’Égypte, antérieurs à l’invasion des Pasteurs, et les livres hébreux montrent cette culture déjà établie, et, quand les Égyptiens ou les Grecs ont parlé de son origine, c’est en l’attribuant à des personnages fabuleux, Isis, Cérés, et Triptolème[6]. En Europe, les

  1. Targioni, Cenni storici, p. 180.
  2. L. Vilmorin, Essai d’un catalogue méthodique et synonymique des froments, Paris, 1850.
  3. Les meilleures figures de ces formes principales de froment se trouvent dans Metzger, Europæische Cerealien, in-folio, Heidelberg, 1824 ; et dans Host, Graminaæ, in-fol., vol. 3.
  4. Tessier, Dict. d’agric, 6, p. 198.
  5. Loiseleur-Deslongchamps, Considérations sur les céréales, 1 vol. in-8o, p. 219.
  6. Ces points d’érudition ont été traités d’une manière très savante et très judicieuse par quatre auteurs : Link, Ueber die ältere Geschichte der Getreide Arten, dans Abhandl. der Berlin, Akad.. 1816, vol. 17, p. 122 ; 1826, p. 67, et dans Die Urwelt und das Alterthum, deuxième édit., Berlin, 1834, p. 399 ; Reynier, Économie des Celtes et des Germains, 1818,