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BANANIER

M. Sagot, par les Français à la Guyanne. Il a peut-être pour origine le nom Bala ou Palan, du Malabar, à la suite d’une introduction par les Portugais, depuis le voyage de Piso.

L’ancienneté et la spontanéité du Bananier en Asie sont des faits incontestables. Il a plusieurs noms sanscrits[1]. Les Grecs, les Latins et ensuite les Arabes en ont parlé comme d’un arbre fruitier remarquable de l’Inde. Pline[2] en parle assez clairement. Il dit que les Grecs de l’expédition d’Alexandre l’avaient vu dans l’Inde, et il cite le nom Pala, qui existe encore au Malabar. Les sages se reposaient sous son ombre et en mangeaient les fruits. De là le nom de Musa sapientum des botanistes. Musa est tiré de l’arabe Mouz ou Mauwz, qu’on voit déjà au XIIIe siècle dans Ebn Baithar. Le nom spécifique paradisiaca vient des hypothèses ridicules qui faisaient jouer au Bananier un rôle dans l’histoire d’Ève et du paradis.

Il est assez singulier que les Hébreux et les anciens Égyptiens[3] n’aient pas connu cette plante indienne. C’est un indice qu’elle n’était pas dans l’Inde depuis un temps très reculé, mais plutôt originaire de l’archipel indien.

Le Bananier offre dans le midi de l’Asie, soit sur le continent, soit dans les îles, un nombre de variétés immense ; la culture de ces variétés remonte dans l’Inde, en Chine, dans l’archipel indien à une époque impossible à apprécier ; elle s’était étendue jadis, même dans les îles de la mer Pacifique[4] et sur la côte occidentale d’Afrique[5] ; enfin les variétés portaient des noms distincts dans les langues asiatiques les plus séparées, comme le sanscrit, le chinois, le malais. Tout cela indique une ancienneté prodigieuse de culture, par conséquent une existence primitive en Asie, et une diffusion contemporaine avec celle des races d’hommes ou antérieure.

On dit avoir trouvé le Bananier spontané en plusieurs points. Cela mérite d’autant plus d’être noté que les variétés cultivées ne donnant souvent pas de graines et se multipliant par division, l’espèce ne doit guère se naturaliser par semis hors des cultures. Roxburgh l’avait vu dans les forêts de Chittagong[6], sous la forme du M. sapientum, Rumphius[7] décrit une variété à petits fruits sauvage dans les îles Philippines. Loureiro[8] parle probablement de la même sous le nom de M. seminifera agrestis, qu’il oppose au M. seminifera domestica, et qui serait donc

  1. Roxburgh et Wallich, Fl. ind., 2, p. 485 ; Piddington, Index.
  2. Pline, Hist., 1. 12, c. 6.
  3. Unger, l. c., et Wilkinson, 2, p. 403, ne le mentionnent pas. Le Bananier se cultive aujourd’hui en Égypte.
  4. Forster, Plant. esc., p. 28.
  5. Clusius, Exot., p. 229 ; Brown, Bot. Congo, p. 51.
  6. Roxburgh, Corom., tab. 275 ; Fl. ind., l. c.
  7. Rumphius, Amb., 5, p. 139.
  8. Loureiro, Fl. coch., p. 791.