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DATTIER

sylvestris, c’est-à-dire sauvage, à baies petites et acerbes ; mais c’est peut-être l’effet d’une naturalisation peu ancienne dans un sol défavorable. Les faits historiques et linguistiques auront plus de valeur dans le cas actuel, quoique sans doute, vu l’ancienneté des cultures, ils ne puissent donner que des indications probables.

D’après les antiquités égyptiennes et assyriennes, ainsi que les traditions et les ouvrages les plus anciens, le Dattier existait en abondance dans la région qui s’étend de l’Euphrate au Nil. Les monuments égyptiens contiennent des fruits et des dessins de cet arbre[1]. Hérodote, à une époque moins reculée (Ve siècle avant Jésus-Christ), parle des bois de Dattiers qui existaient en Babylonie ; plus tard Strabon s’est exprimé d’une manière analogue sur ceux d’Arabie, par où il semble que l’espèce était plus commune qu’à présent et plus dans les conditions d’une essence forestière naturelle. D’un autre côté Carl Ritter fait la remarque ingénieuse que les livres hébreux les plus anciens ne parlent pas des Dattiers comme donnant un fruit recherché pour la nourriture de l’homme. Le roi David, vers l’an 1000 avant Jésus-Christ, environ sept siècles après Moïse, n’énumère pas le Dattier au nombre des arbres qu’il convient de planter dans ses jardins. Il est vrai qu’en Palestine, sauf à Jéricho, les dates ne mûrissent guère. Plus tard, Hérodote dit des Dattiers de Babylonie, que la majorité seulement des pieds donnait de bons fruits, dont on faisait usage. Ceci paraît indiquer le commencement d’une culture perfectionnée au moyen de la sélection des variétés et du transport des fleurs mâles au milieu des branches de pieds femelles, mais cela signifie peut-être aussi qu’Hérodote ne connaissait pas l’existence des pieds mâles.

A l’occident de l’Égypte, le Dattier existait probablement depuis des siècles ou des milliers d’années quand Hérodote les a mentionnés. Il parle de la Libye. Aucun document historique n’existe pour les oasis du Sahara, mais Pline[2] mentionne les Dattiers des îles Canaries.

Les noms de l’espèce témoignent d’une grande ancienneté soit en Asie, soit en Afrique, attendu qu’ils sont nombreux et fort différents. Les Hébreux appelaient le Dattier Tamar et les anciens Égyptiens Beq[3]. L’extrême diversité de ces mots, d’une grande antiquité, fait présumer que les peuples avaient trouvé l’espèce indigène et peut-être déjà nommée dans l’Asie occidentale et en Égypte. La multiplicité des noms persans, arabes et berbères, est incroyable[4]. Les uns dérivent du mot hébreu, les autres de sources inconnues. Ils s’appliquent souvent à des états différents du fruit ou à des variétés cultivées différentes, ce qui

  1. Unger, Pflanzen d. alt. Ægyptens, p. 38.
  2. Pline, Hist., 6, c. 37.
  3. Unger, l. c.
  4. Voir C. Ritter, l. c.