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PLANTES CULTIVÉES POUR LEURS FRUITS

tation préhistorique du Figuier la région moyenne et méridionale de la mer Méditerranée, depuis la Syrie jusqu’aux îles Canaries.

On peut avoir du doute sur l’ancienneté des Figuiers maintenant dans le midi de la France ; mais un fait bien curieux doit être mentionné. M. Planchon a trouvé dans les tufs quaternaires de Montpellier et M. le marquis de Saporta[1] dans ceux des Aygalades, près de Marseille, et dans le terrain quaternaire de La Celle, près de Paris, des feuilles et même des fruits du Ficus Carica sauvage avec des dents d’Elephas primigenius, et des feuilles de végétaux, dont les uns n’existent plus, et d’autres comme le Laurus canariensis, sont restés aux îles Canaries. Ainsi le Figuier a peut-être existé sous sa forme actuelle, dans un temps aussi reculé. Il est possible qu’il ait péri dans le midi de la France, comme cela est arrivé certainement à Paris ; après quoi il serait revenu à l’état sauvage dans les localités du midi. Peut-être les Figuiers dont Webb et Berthelot avaient vu de vieux individus dans les endroits les plus sauvages des Canaries descendaient-ils de ceux qui existaient à l’époque quaternaire.

Arbre à pain. — Artocarpus incisa, Linné.

L’Arbre à pain était cultivé dans toutes les îles de l’archipel asiatique et du grand Océan voisines de l’équateur, depuis Sumatra jusqu’aux îles Marquises, lorsque les Européens ont commencé de les visiter. Son fruit est constitué, comme dans l’Ananas, par un assemblage de feuilles florales et de fruits soudés en une masse charnue plus ou moins sphérique, et, comme dans l’Ananas encore, les graines avortent dans les variétés cultivées les plus productives[2]. On fait cuire des tranches de cette sorte de fruit pour les manger.

Sonnerat[3] avait transporté l’Arbre à pain à l’île Maurice, où l’intendant Poivre avait eu soin de le répandre. Le capitaine Bligh avait pour mission de le transporter dans les Antilles anglaises. On sait qu’une révolte de son équipage l’empêcha de réussir la première fois, mais dans un second voyage il fut plus heureux. En janvier 1793, il débarqua 150 pieds dans l’île de Saint-Vincent, d’où l’on a répandu l’espèce dans plusieurs localités de l’Amérique équinoxiale[4].

Rumphius[5] avait vu l’espèce à l’état sauvage dans plusieurs

  1. Planchon, Étude sur les tufs de Montpellier, p. 63 ; de Saporta, La flore des tufs quaternaires en Provence, dans les Comptes rendus de la 33e session du Congrès scientifique de France, et à part, p. 27, Bull. Soc. geolog., 1873-74, d. 442.
  2. Voir les belles planches publiées dans Tussac, Flore des Antilles, vol. 2, pl. 2 et 3 ; et Hooker, Botanical magazine, t. 2869-2871.
  3. Voyage à la Nouvelle-Guinée, p. 100.
  4. Hooker, l. c.
  5. Rumphius, Herb. Amboin., 1, p. 112, pl. 33.