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ARCHÉOLOGIE ET PALÉONTOLOGIE

tout à coup de grands développements par l’effet de la culture, car l’homme n’aurait pas commencé à la cultiver si elle n’avait offert dès l’origine quelque chose d’utile ou agréable.

Une fois la plante cultivée réduite à ce qui permet de la comparer raisonnablement aux formes analogues spontanées, il faut savoir encore quel groupe de plantes à peu près semblables on juge à propos de désigner comme constituant une espèce. Sur ce point, les botanistes sont seuls compétents, parce qu’ils ont l’habitude d’apprécier les différences et les ressemblances, et qu’ils n’ignorent pas la confusion de certains ouvrages en fait de nomenclature. Ce n’est pas ici le lieu de discuter ce qu’on peut appeler raisonnablement une espèce. On verra dans quelques-uns de mes articles les principes qui me paraissent les meilleurs. Comme leur application exigerait souvent des observations qui n’ont pas été faites, j’ai pris le parti de distinguer quelquefois des formes quasi spécifiques dans un groupe qui me parait être une espèce, et j’ai cherché l’origine géographique de ces formes comme si elles étaient vraiment spécifiques.

En résumé, la botanique fournit des moyens précieux pour deviner ou constater l’origine des plantes cultivées et pour éviter des erreurs. Il faut se bien persuader cependant que la combinaison d’observations sur le terrain et dans le cabinet est nécessaire. Après le collecteur qui voit les plantes dans une localité ou une région et qui rédige peut-être une flore ou un catalogue d’espèces, il est indispensable d’étudier les distributions géographiques, connues ou probables, d’après les livres et les herbiers, et de penser aux principes de la géographie botanique et aux questions de classification, ce qui ne peut se faire ni en voyageant ni en herborisant. D’autres recherches, dont je vais parler, doivent être combinées avec celles de botanique, si l’on veut arriver à des conclusions satisfaisantes.

§ 3. — Archéologie et paléontologie.

La preuve la plus directe qu’on puisse imaginer de l’existence ancienne d’une espèce dans un pays est d’en voir des fragments reconnaissables dans de vieux édifices ou de vieux dépôts, d’une date plus ou moins certaine.

Les fruits, graines et fragments divers de plantes sortis des tombeaux de l’ancienne Égypte et les dessins qui les entourent dans les pyramides, ont donné lieu à des recherches d’une grande importance, dont j’aurai souvent à faire mention. Il y a pourtant ici une chance d’erreur : l’introduction frauduleuse de plantes modernes dans les cercueils de momies. On l’a reconnue facilement, quand il s’est agi, par exemple, de grains de maïs, plante d’origine américaine, glissés par les Arabes ; mais on peut avoir ajouté des espèces cultivées en Égypte depuis deux ou trois mille