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PLANTES CULTIVÉES POUR LEURS FRUITS

bords du Niger, fondé sur le dire d’un seul voyageur, je persiste à croire l’espèce originaire de l’ancien monde et introduite en Amérique par les Européens.

Courge Pépon. — Citrouille. — Cucurbita Pepo et C. Melopepo, Linné.

Les auteurs modernes comprennent dans le Cucurbita Pepo la plupart des formes désignées sous ce nom par Linné et en outre celles qu’il nommait C. Melopepo. Ces formes sont excessivement variées quant aux fruits, ce qui montre une très ancienne culture. On remarque dans leur nombre : la Courge ou Citrouille des Patagons, à fruits cylindriques énormes ; la Courge sucrière, dite du Brésil ; la Courge à la moelle ou Vegetable marrow des Anglais, à petits fruits allongés ; les Barbérines, à fruits bosselés ; le Patisson ou Bonnet d’électeur, à fruit conique, surbaissé et lobé d’une manière bizarre, etc. Il ne faut attacher aucune valeur aux noms de pays dans ces désignations de variétés, car nous avons vu souvent qu’ils expriment autant d’erreurs que de vérités. Les noms botaniques rapportés à l’espèce par M. Naudin et M. Gogniaux sont nombreux, par suite de la mauvaise habitude qui existait il n’y a pas longtemps de décrire comme espèces des formes uniquement de jardins, sans tenir compte des effets prodigieux de la culture et de la sélection sur l’organe pour lequel on cultive une plante.

La plupart des variétés existent dans les jardins des régions chaudes ou tempérées de l’ancien et du nouveau monde. L’origine de l’espèce est regardée comme douteuse. J’hésitais, en 1855[1], entre l’Asie méridionale et la région de la mer Méditerranée. MM. Naudin et Cogniaux[2] admettent comme probable l’Asie méridionale, et les botanistes des États-Unis, de leur côté, ont donné des motifs pour croire à une origine américaine. La question mérite d’être examinée d’une manière précise.

Je chercherai d’abord quelles formes, rapportées aujourd’hui à l’espèce, ont été indiquées comme croissant quelque part à l’état spontané.

La variété ovée, Cucurbita ovifera, Linné, avait été recueillie jadis par Lerche, près d’Astrakhan ; mais aucun botaniste du siècle actuel n’a confirmé ce fait, et il est probable qu’il s’agissait d’une plante cultivée. D’ailleurs Linné n’affirme pas la qualité spontanée. J’ai consulté toutes les flores asiatiques et africaines sans trouver la moindre indication d’une variété qui fût sauvage. De l’Arabie, ou même de la côte de Guinée au Japon, l’espèce ou les formes qu’on lui rapporte sont toujours dites cultivées. Pour l’Inde, Roxburgh l’avait remarqué jadis, et ce n’est

  1. Géogr. bot. raisonnée, p. 902.
  2. Naudin, Ann. sc. nat., série 5, vol. 6, p. 9 ; Cogniaux, dans de Candolle, Monogr. Phaner., 3, p. 546.