Page:Alphonse de Candolle - Origine des plantes cultivées, 1883.djvu/215

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
201
POTIRON

examiner avec d’autant plus de soin qu’on m’a reproché aux États-Unis de n’en avoir pas tenu suffisamment compte.

D’abord, sur dix espèces connues du genre Cucurbita, six sont certainement spontanées en Amérique (au Mexique ou en Californie), mais ce sont des espèces vivaces, tandis que les Courges cultivées sont annuelles.

La plante nommée Jurumu par les Brésiliens, figurée par Pison et Marcgraf[1], est rapportée par les modernes au Cucurbita maxima. La planche et les courtes explications des deux auteurs conviennent assez, mais il parait que c’était une plante cultivée. Elle peut avoir été apportée d’Afrique ou d’Europe par les Européens, entre la découverte du Brésil, en 1504, et les voyages des auteurs sus-mentionnés, qui ont eu lieu en 1637 et 1638. Personne n’a trouvé l’espèce sauvage dans l’Amérique méridionale ou septentrionale. Je ne rencontre dans les ouvrages sur le Brésil, la Guyane, les Antilles aucun indice de culture ancienne ou d’existence spontanée, soit d’après les noms, soit d’après des traditions ou opinions plus ou moins précises. Aux États-Unis, les savants qui connaissent le mieux les langues et les usages des indigènes, par exemple le Dr Harris autrefois, et M. Trumbull plus récemment[2], ont soutenu que les Cucurbitacées appelées Squash par les Anglo-Américains et Macock ou Cashaw, Cushaw par d’anciens voyageurs en Virginie, répondent à des Courges. M. Trumbull dit que Squash est un mot indien. Je n’en doute pas, d’après son assertion, mais ni les plus habiles linguistes ni les voyageurs du XVIIe siècle[3] qui ont vu les indigènes pourvus de fruits appelés dans leurs livres Citrouilles, Courges, Pompions, Gourdes, n’ont pu donner la preuve que ce fût telle ou telle des espèces reconnues distinctes aujourd’hui par les botanistes. Cela nous apprend seulement que les indigènes, un siècle après la découverte de la Virgime, vingt à quarante ans après la colonisation par W. Raleigh, faisaient usage de certains fruits de Cucurbitacées. Les noms vulgaires sont encore si confus aux États-Unis que le Dr Asa Gray, en 1868, indique Pumpkin et Squash comme répondant à des espèces de Cucurbita[4], tandis que Darlington[5]. attribue le nom de Pumpkin à la Courge ordinaire (Cucurbita Pepo), et celui de Squash aux variétés de celle-ci qui rentrent dans les formes Melopepo des anciens botanistes. Ils n’attribuent pas un nom vulgaire, particulier et certain, au Potiron (Cucurbita maxima).

En définitive, sans ajouter une foi implicite à l’indigénat sur les

  1. Piso, Brasil., éd. 1658, p. 264 ; Marcgraf, éd. 1648, p. 44.
  2. Harris, American Journal, 1857, vol. 24, p. 441 ; Trumbull, Bull. of Torreys Club, 1876, vol. 6, p. 69.
  3. Champlain, en 1604 ; Strachey, en 1610 ; etc.
  4. Asa Gray, Botany of the northem states, éd. 1868, p. 186.
  5. Darlington, Flora cestrica, 1853. p. 94