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PLANTES CULTIVÉES POUR LEURS FRUITS

la Gourde tabatière. On reconnaît toujours l’espèce à sa fleur blanche, et à la dureté de la partie extérieure du fruit, qui permet de l’employer comme vase pour les liquides ou réservoir d’air, propre à soutenir les nageurs novices. La chair intérieure est tantôt douce et mangeable, tantôt amère et même purgative.

Linné[1] disait l’espèce américaine. De Candolle[2] l’a considérée comme probablement d’origine indienne, et la suite a confirmé cette opinion.

On a trouvé, en effet, le Lagenaria vulgaris sauvage au Malabar et dans les forêts humides de Deyra Doon[3] Roxburgh[4] le considérait bien comme spontané dans l’Inde, quoique les flores subséquentes l’aient dit seulement cultivé. Enfin Rumphius[5] indique des pieds sauvages, sur le bord de la mer, dans une localité des îles Moluques. Les auteurs mentionnent ordinairement la pulpe comme amère dans ces individus auvages, mais elle l’est quelquefois aussi dans les formes cultivées. La langue sanscrite distinguait déjà la Gourde ordinaire, Ulavou, et une autre, amère, Kutou-Toumbi, à laquelle A. Pictet attribue aussi le nom Tiktaka ou Titkikâ[6]. Seemam[7] a vu l’espèce « cultivée et naturalisée » aux îles Fidji. Thozet l’a recueillie sur la côte de Queensland, en Australie[8], mais c’était peut-être le résultat de cultures dans le voisinage. Les localités de l’Inde continentale paraissent plus sûres et plus nombreuses que celles des îles du midi de l’Asie.

L’espèce a été trouvée, également sauvage, en Abyssinie, dans la vallée de Hieha, par Dillon, et parmi des buissons et des rocailles d’une autre localité, par Schimper[9].

De ces deux régions de l’ancien monde, elle s’est répandue dans les jardins de tous les pays tropicaux et des pays tempérés ayant une chaleur estivale suffisante. Parfois elle s’est naturalisée hors des cultures, comme on l’a observé en Amérique[10].

Le plus ancien ouvrage chinois mentionnant la Gourde est celui de Tchong-tchi-chou, du Ier siècle avant Jésus-Christ, cité dans un ouvrage du Ve ou VIe siècle, selon le Dr  Bretschneider[11].

  1. Linné, Species plantarum, p. 1434, sous Cucurbita.
  2. A. P. de Candolle, Flore française (1805), vol. 3, p. 692.
  3. Rheede, Malabar, 8, pl. 1, 5 ; Royle, Ill. Himal., p. 218.
  4. Roxburgh, Flora indica, éd. 1832, v. 3, p. 719.
  5. Rumphius, Amboin., vol. 5, p. 397, t. 144.
  6. Piddmgton, Index, au mot Cucurbita lagenaria (en changeant la cacographie anglaise) ; Ad. Pictet, Origines indo-europ., éd. 3, vol. 1, p. 386.
  7. Seemann, Flora Vitiensis, p. 106.
  8. Bentham, Flora australiensis, 3, p. 316.
  9. Décrite d’abord sous le nom de Lagenaria idolatrica, A. Richard, Tentamen fl. abyss., 1, p. 293, et ensuite Naudin et Cogniaux ont reconnu l’identité avec le L. vulgaris.
  10. Torrey et Gray, Flora of North America, 1, p. 543 ; Grisebach, Flora of british W. India islands, p. 288.
  11. Bretschneider, lettre du 23 août 1881.